Le 28 août 2024, Xiomara Castro, présidente du Honduras, a exprimé sur le réseau social X son mécontentement vis-à-vis des États-Unis, qu’elle accuse de s’immiscer dans la politique intérieure de son pays. Ses propos, cinglants, dénoncent un interventionnisme américain qui chercherait à diriger les affaires honduriennes par l’intermédiaire de leur ambassade à Tegucigalpa. « L’ingérence et l’interventionnisme des États-Unis […] est intolérable », a-t-elle écrit, annonçant avoir ordonné à son ministre des Affaires étrangères de dénoncer le traité d’extradition en vigueur depuis 1912. Ce dernier permettait aux États-Unis d’extrader des Honduriens impliqués dans des activités criminelles, notamment le narcotrafic.
Un traité clé dans la lutte contre le narcotrafic
Ce traité, bien que méconnu du grand public, a longtemps été un pilier de la coopération entre les États-Unis et le Honduras dans la lutte contre le trafic de drogue. Depuis sa signature en 1912, il a permis l’extradition d’environ cinquante individus honduriens vers les États-Unis, dont l’ancien président Juan Orlando Hernandez, un cas qui a marqué l’histoire récente du pays. Juan Orlando Hernandez, qui a dirigé le Honduras de 2014 à 2022, a été extradé et condamné à 45 ans de prison aux États-Unis pour son implication dans le trafic de cocaïne. Il utilisait les forces de police et l’armée pour faciliter l’acheminement de stupéfiants vers le territoire américain. Son frère, Antonio « Tony » Hernandez, un ancien député, purge également une peine de prison à vie pour des crimes similaires.
Sous le régime de Hernandez, le Honduras avait acquis la triste réputation de « narco-État », en raison des liens étroits entre le gouvernement et les cartels de drogue. La dénonciation du traité d’extradition par Xiomara Castro pourrait donc constituer un tournant majeur dans la lutte contre ces réseaux criminels. Si certains analystes voient dans cette décision un moyen pour la présidente de s’affirmer face à la domination américaine, d’autres craignent que cela ne complique la coopération internationale pour endiguer la violence liée à la drogue dans le pays.
Les tensions avec Washington
La décision de rompre ce traité intervient dans un contexte de tensions grandissantes entre le Honduras et les États-Unis. Ces tensions ont atteint un point culminant récemment après que l’ambassadrice américaine au Honduras, Laura Dogu, a publiquement critiqué une rencontre entre des hauts responsables honduriens et Vladimir Padrino Lopez, ministre de la Défense du Venezuela. Lopez est un allié proche du président vénézuélien Nicolas Maduro, un dirigeant controversé que les États-Unis accusent de multiples violations des droits de l’homme et d’être impliqué dans le trafic de drogue.
La rencontre a fait froncer les sourcils à Washington. Laura Dogu n’a pas caché son désaccord en déclarant aux journalistes : « Il a été surprenant pour moi de voir le ministre de la Défense hondurien et le chef d’état-major assis à côté d’un narcotrafiquant au Venezuela ». Xiomara Castro n’a pas tardé à riposter, accusant les États-Unis d’« attaquer, mépriser et violer impunément les principes et les pratiques du droit international ».
Une politique étrangère controversée
Depuis son arrivée au pouvoir en janvier 2022, Xiomara Castro a tenté de redéfinir la politique étrangère du Honduras. En s’éloignant des positions traditionnelles alignées sur celles des États-Unis, elle a affiché une solidarité avec des régimes jugés autoritaires par une grande partie de la communauté internationale, notamment le Venezuela, Cuba, et la Bolivie. Son choix de reconnaître la réélection de Nicolas Maduro en tant que président du Venezuela, alors que de nombreux pays dénoncent une fraude électorale, a mis en lumière sa volonté de s’émanciper de la tutelle américaine.
Néanmoins, la présidente Castro fait face à des défis majeurs, notamment le narcotrafic et la corruption, deux maux profondément ancrés dans les institutions honduriennes. Sa décision de dénoncer le traité d’extradition pourrait compliquer encore davantage sa tâche, tout en accentuant l’isolement diplomatique de son gouvernement.
L’avenir de cette alliance incertaine entre le Honduras et les États-Unis sera scruté de près, tant la stabilité du pays dépend de ses relations internationales et de son engagement dans la lutte contre le crime organisé.





