La République dominicaine a récemment déclaré son intention d’expulser 10 000 Haïtiens en situation irrégulière chaque semaine. Cette décision, annoncée le 2 octobre 2024, fait suite à la montée continue de l’immigration illégale en provenance d’Haïti, un pays en proie à une violence croissante alimentée par les gangs et une instabilité politique persistante. Le gouvernement dominicain, dirigé par le président Luis Abinader, a justifié cette initiative comme une réponse nécessaire à ce qu’il qualifie d’« excès de population migrante » dans les communautés dominicaines.
Luis Abinader, qui est au pouvoir depuis 2020, a durci la politique migratoire de son pays dès le début de son mandat. En 2023, pas moins de 250 000 Haïtiens sans papiers ont été expulsés, et ce nouveau plan d’expulsion pourrait faire plus que doubler ce chiffre. L’objectif est de protéger la stabilité nationale dans un contexte où les résultats obtenus par la Mission multinationale d’appui à la sécurité (MMAS) en Haïti sont jugés limités. « Nous avons averti les Nations unies que, face à l’inaction de la communauté internationale, nous prendrons des mesures pour garantir la sécurité de notre pays », a déclaré Abinader.
Parallèlement à ces expulsions, la République dominicaine a renforcé son dispositif sécuritaire à la frontière avec Haïti. Un mur de 164 km a été construit, avec la promesse de l’étendre davantage, tandis que des technologies de surveillance telles que des drones et des caméras ont été déployées. Le gouvernement dominicain, qui a également accru la présence de personnel aux frontières, s’efforce ainsi de limiter l’afflux de migrants illégaux, aggravé par la détérioration des conditions de vie en Haïti.
Haïti est confronté à une crise sécuritaire sans précédent, marquée par une recrudescence de la violence des gangs, en particulier dans la capitale, Port-au-Prince. Selon les Nations unies, 3 661 personnes ont été tuées en Haïti au cours du premier semestre 2024, et environ 80 % de la capitale serait contrôlée par des groupes armés. Plus de 700 000 Haïtiens ont été déplacés, et près de la moitié de la population haïtienne est menacée de famine.
Malgré le déploiement de la MMAS, sous la direction du Kenya, les résultats sur le terrain sont jugés insuffisants pour restaurer l’ordre. La communauté internationale est appelée à intensifier ses efforts, alors que le gouvernement dominicain multiplie les expulsions de migrants haïtiens. Cette situation a suscité de vives réactions de la part des groupes de défense des droits de l’homme, qui accusent les autorités dominicaines d’agir de manière discriminatoire. Des associations telles que le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) ont appelé les pays à cesser les retours forcés en Haïti, arguant que la vie et la sécurité des Haïtiens sont en grave danger.
Toutefois, les autorités dominicaines restent fermes sur leur position. Le porte-parole du président Abinader, Homero Figueroa, a assuré que ces expulsions se dérouleraient dans le respect des droits humains, mais qu’elles débuteraient sans délai. « L’opération vise à rétablir l’équilibre dans les communautés dominicaines », a-t-il déclaré. Néanmoins, les critiques dénoncent une politique migratoire radicale, marquée par une longue histoire de tensions entre les deux pays partageant l’île d’Hispaniola.
L’immigration haïtienne en République dominicaine, bien qu’historique, est devenue une source de frictions sociales et politiques. Certains dénoncent des pratiques discriminatoires, notamment le profilage racial, lors des expulsions. Mais avec la crise persistante en Haïti et la pression croissante sur les infrastructures dominicaines, les autorités locales considèrent ces expulsions massives comme un moyen nécessaire de protéger leurs citoyens. Quant à la communauté internationale, elle est de nouveau placée face à la difficile tâche d’aider un pays en crise tout en préservant les droits humains des migrants haïtiens.





